[Fiscalité de l’innovation] Les nouveautés instaurées par la loi de finances 2022
La loi de finances 2022 instaure des changements significatifs en fiscalité de l’innovation en faveur du contribuable avec la création d’un nouveau crédit d’impôt visant à encourager la collaboration entre les organismes privés et publics, une revalorisation du taux du CII à 30 % et un élargissement du statut de JEI aux entreprises créées depuis moins de 11 ans.
Le crédit d’impôt pour la recherche collaborative (CICO)
Depuis le 1er janvier 2022, l’arrêt du doublement des dépenses de recherche engagées auprès d’organismes publics (institut de recherche, université…) dans l’assiette du CIR a mis fin à un avantage qui privilégiait les prestaires publics par rapport à ceux du privé. Le calcul est simple, 60 % des factures des prestaires publics pouvaient être récupérés en crédit d’impôt contre 30 % des factures des prestataires privés.
Depuis l’annonce de cette harmonisation (loi de finances 2021), de nombreuses voix se sont élevées pour alerter sur l’effet préjudiciable de la disparition de cette incitation sur les collaborations publiques privées encore fragiles. La réponse, la création d’un nouveau crédit d’impôt, le crédit d’impôt pour la recherche collaborative (CICO) instauré par la loi finance 2022 et applicable dès le 1er janvier, pour un coût estimé par les députés à 140 M€ par an.
Dans les grandes lignes, les caractéristiques du CICO sont les suivantes :
- Taux de 40% pour les grandes entreprises et de 50 % pour les PME (moins avantageux que le CIR dans son ancienne forme (60%) mais plus avantageux que le CIR actuel (30%)).
- L’assiette est calculée sur les factures des organismes publics.
- Le CICO est imputé sur l’IS et est remboursé au bout de trois ans s’il n’a pas pu être imputé (remboursement immédiat pour les PME).
- Le CICO est plafonné à 6 millions d’euros.
- Sur un même projet, le bénéfice du CICO est non cumulable avec le CIR.
Il est important de noter que les dépenses valorisées aux CICO sont pris en compte lors de l’appréciation du seuil de 100 millions d’euros de dépenses de recherche au-delà duquel le taux appliqué pour le calcul du CIR est porté à 5 %.
Les organismes publics éligibles au CICO sont les organismes de recherche et de diffusion des connaissances (ORDC) définis par la commission Européen (cette désignation inclue notamment les universités ou encore les laboratoires de recherche publics). Pour que le statut d’ORDC soit reconnu, ces organismes doivent être agréés par le ministre chargé de la recherche selon des modalités qui seront définies prochainement par décret. Une dernière condition d’éligibilité est l’absence de lien de dépendance entre l’organisme public et l’entreprise bénéficiaire.
Le contrat de collaboration de recherche entre l’entreprise et l’ORDC doit quant à lui répondre à plusieurs critères qui démontrent le partage des risques et des résultats entre les partenaires :
- Les dépenses de recherche facturées par les ORDC doivent correspondre à leur coût de revient.
- Les dépense de recherche facturées par les ORDC ne doivent pas excéder 90 % des dépenses totales du projet (au minimum 10 % des dépenses du projet doivent être portées par l’ORDC).
- Les résultats du projet de recherche ne pourront pas être attribués en totalité à l’entreprise.
- L’ORDC doit disposer du droit de publier les résultats de ses propres recherches menées dans le cadre de la collaboration.
Qu’en est-il des contrats de collaboration contractés avant le 1er janvier 2022 et s’étalant au-delà de cette date sur plusieurs années ? Resteront-ils uniquement éligibles au CIR ? Cette configuration étant fortement pénalisante pour les sociétés qui pourraient avoir dimensionné leurs projets en prenant en compte un taux de crédit d’impôt de 60 % sur ses dépenses à venir.
Certaines modalités d’application du CICO restent à éclaircir notamment dans son articulation avec le dispositif du CIR. Les organismes publics pour être éligibles au CICO devront bénéficier d’un agrément délivré par le ministre chargé de la recherche et pour être éligibles au CIR ils devront bénéficier également d’un agrément au même titre que les entreprises privées, s’agira-t-il de deux procédures distinctes ? Et dans ce cas les organismes publics devront ils disposer de deux agréments pour être éligibles aux deux crédits d’impôt ? Un plafond de 6 millions d’euros s’applique au CICO, en cas de dépassement, est-il possible de bénéficier du CIR sur l’excédent ?
En synthèse, la création du CICO doit permettre de maintenir une fiscalité encourageant les partenariats publics-privés qui sont au cœur des innovations de ruptures. Il permet de récupérer sous forme de crédit d’impôt 40 % des factures des partenaires publics pour les grandes entreprises et 50 % pour les PME. Le CICO est plafonné à 6 millions d’euros et il est non cumulable avec le CIR sur un même projet. Les organismes publics éligibles sont les ORDC et ils devront disposer d’un agrément délivré par le ministre chargé de la recherche. Les travaux de recherche devront être réalisés dans le cadre d’une collaboration qui se caractérise par le partage des risques et des résultats. Les modalités d’application du CICO restent à clarifier sur certains points, le décret d’application est donc fortement attendu.
Le dispositif du CII est prolongé et son taux porté à 30 %
Le dispositif du crédit d’impôt innovation (CII) réservé aux PME pouvait être abrogé le 31 décembre 2022, la dernière loi finance annonce une prolongation du dispositif au 31 décembre 2024. Son taux a également été revalorisé de 20 % à 30 % et de 40 % à 60 % pour les entreprises situées en Outre-Mer, pour s’aligner sur les taux pratiqués pour le CIR (une des critiques faites au CII était que la différence de taux conduisait à une lecture compliquée du dispositif). Le plafond de CII demeure quant à lui constant à 400 000 euros par an. Ce nouveau taux s’applique aux dépenses exposées à partir du 1er janvier 2023 jusqu’au 31 décembre 2024.
Le statut de JEI étendu aux entreprises innovantes de moins de 11 ans
Les jeunes entreprises exerçant des activités innovantes peuvent prétendre au statut de JEI sous réserve du respect de plusieurs critères et ainsi bénéficier d’exonérations fiscales et sociales. Un de ces critère porte sur l’âge de l’entreprise qui a été porté à 11 ans par la dernière loi finance contre 8 ans auparavant.
Sources : loi de finances 2022, amendements du projet de loi de finances 2022 n°II-3296 et n°815.