[Jurisprudence CIR] Des rapports d’expertise demandés par la société requérante parviennent à remettre en cause les conclusions de l’expert du MESRI
Dans un arrêt Société ABMI Ingénierie du 21 septembre 2023, la CAA de Lyon s’est fondée sur la contradiction du rapport d’expertise du MESRI par ceux établis à la demande de la société requérante pour ordonner une expertise contradictoire sur l’éligibilité des projets en litige.
Les faits
La société ABMI Ingénierie a été assujettie à des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés à raison de la remise en cause du CIR dont elle a bénéficié pour les dépenses liées à vingt-six projets.
Le jugement de la Cour
La CAA de Lyon procède à l’appréciation de l’éligibilité des projets en litige. Elle examine notamment « si les opérations de recherche apportent une contribution théorique ou expérimentale à la résolution de problèmes techniques, ou bien présentent un caractère de nouveauté au sens de l’article 49 septies F de l’annexe III du code général des impôts ».
Afin de se prononcer sur certains projets, la CAA ordonne également qu’une expertise contradictoire soit réalisée, sur le fondement de l’article R.621-1 du code de justice administrative, en vue de :
- Donner un avis sur des projets pour lesquels les conclusions de l’expert du ministère de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (MESRI) sont « contrebattues » par les rapports de l’expert mandaté par la société ;
- Se faire communiquer les documents nécessaires à son examen, notamment pour un projet confidentiel pour lequel la documentation transmise à l’expert du MESRI était peu étayée ;
- D’obtenir les éléments lui permettant de se prononcer sur le montant des dépenses exclusivement affectées aux opérations de R&D et de préciser la qualification des personnels affectés à ces opérations, contestés par l’administration.
Analyse
Il s’agit d’un des rares arrêts dans lequel le juge administratif ordonne une expertise contradictoire en matière de CIR. La dernière occurrence étant l’arrêt de la CAA de NANCY, 28/04/2022, SAS Archefinances, 20NC00485.
Le dispositif de l’arrêt est d’autant plus intéressant que l’expertise contradictoire est en partie motivée par les conclusions des rapports d’expertise demandés par la société, qui entrainent la remise en cause de celles du MESRI. Il est, en effet, généralement jugé que les expertises demandées par le contribuable ne sont pas assez circonstanciées ou motivées pour conduire à cette remise en cause.
Par ailleurs, il est également à souligner que la Cour prend acte du caractère confidentiel d’un des projets et du fait, qu’en conséquence, toutes les informations nécessaires à la détermination de son éligibilité au CIR n’ont pas été communiquées à l’expert du MESRI.
Source : CAA de Lyon, 21 septembre 2023, Société ABMI Ingénierie, 21LY02422