[Jurisprudence CIR] Dans quelles conditions un organisme sous-traitant agréé peut-il déclarer du CIR pour son compte ?
La Cour administrative d’Appel de Paris (CAA) a rendu, le 26 juin 2024, un arrêt rappelant les règles de calcul du CIR pour les organismes sous-traitants agréés. Avec la décision Takima du Conseil d’État en 2020, le mode de calcul a en effet été assoupli.
Les faits
Dans cette affaire, la société requérante, qui agit en tant qu’organisme de recherche sous-traitant agréé, demande la restitution des créances de CIR remises en cause par l’administration fiscale au titre des années 2011, 2012 et 2013.
Les sommes remises en cause par l’administration fiscale correspondent aux opérations de recherches effectuées pour le compte de donneurs d’ordre.
Pour rappel, aux termes de l’article 244 quater B du code général des impôts (CGI), les dépenses engagées pour les opérations de recherche réalisées directement par des organismes sous-traitants agréés sont éligibles au CIR.
Toutefois, le même article, indique que les sommes reçues par ces organismes pour la réalisation de ces opérations de recherche doivent être déduites de la base de calcul de leur propre CIR afin d’éviter qu’une même activité bénéficie deux fois du crédit d’impôt. Ces dispositions pouvaient conduire les organismes sous-traitants agréés à déclarer un CIR négatif dans la mesure où ils étaient amenés à déduire l’intégralité des sommes reçues par leurs donneurs d’ordre.
La jurisprudence du Conseil d’État dite Takima (CE, 09 octobre 2020, Takima, 440523) assouplit cette règle en considérant que la loi interdit aux organismes agréés d’inclure dans leur CIR les dépenses exposées pour le compte de tiers et non les sommes facturées à ce titre [Pour en savoir plus sur la jurisprudence Takima]. Par conséquent, doit être retenu dans le CIR de ces organismes la différence entre le montant total des dépenses éligibles de leur CIR et le montant des dépenses engagées pour les projets de R&D réalisés pour des donneurs d’ordres.
Ainsi, à la lumière de cette interprétation, la CAA de Paris considère ici que :
- Ne sont pas éligibles les dépenses exposées pour la réalisation d’opérations de recherche confiées par des donneurs d’ordres (même lorsque ces derniers ne prennent pas en compte ces dépenses dans leur propre CIR) ;
- En revanche, sont éligibles les dépenses exposées pour la réalisation d’opérations de recherche pour leur propre compte (y compris lorsqu’elles le sont pour l’exécution de prestations pour un tiers, dont l’objet ne porte pas sur la réalisation d’opérations de recherche) ou pour des clients non-éligibles.
Le jugement de la Cour
Pour 2011
En l’espèce, la Cour juge que la société requérante justifie, grâce au détail des dépenses, que la différence entre le montant total facturé aux donneurs d’ordre et le montant des dépenses de R&D engagées au bénéfice de ces donneurs d’ordre a été déduit de la base de son CIR à tort.
Pour 2012 et pour 2013
La Cour juge que les documents et factures fournis par la société requérante, ni même le rapport d’expertise qu’elle a commandé, ne permettent pas de justifier de la nature des prestations facturées (libellés peu explicites, descriptions insuffisamment détaillées) et de leur lien avec les commandes de ses donneurs d’ordre.
Par suite, il n’est pas établi que les prestations réalisées correspondraient à des dépenses de recherche réalisées à l’occasion de l’exécution de prestations au profit de la société cliente et dont l’objet n’aurait pas porté sur la réalisation d’opérations de R&D éligibles au CIR de cette dernière société.
Analyse
Lors de la déclaration de CIR d’organismes sous-traitants agréés, il faut être vigilant à plusieurs éléments:
- Être en mesure de prouver que les dépenses sont bien en lien avec des projets clients ;
- Être en mesure de prouver qu’elles ne constituent pas des dépenses éligibles pour les clients (libellés de factures, contrats).
CAA de PARIS, 26 juin 2024, Akka Technologies, 23PA00464, 23PA00465, 23PA00475